Emilie BEQUART et Valentin LEBONDIDIER

Institut d'Economie Scientifique et de Gestion

Année universitaire 1999-2000

Directeurs de Mémoire:

Jean FIEVEZ : Consultant du cabinet LIA

Philippe BOURGUIGNON : Professeur de gestion à l'IESEG

 

La méthode des Unités de Valeur Ajoutée, un outil révolutionnaire d'aide à la décision?

L'analyse du fonctionnement interne de l'entreprise et de l'interaction avec son environnement ne peut se faire sans l'aide de modèles de représentation. Malheureusement, le coût de revient d'un objet est une donnée difficile à établir. D'autant plus que les structures d'analyse deviennent énormément complexes.

Les méthodes classiques de comptabilité analytique sont nées du besoin naturel de connaissance et de contrôle des coûts. Pour tenir son rôle d'aide à la décision, le système d'information comptable doit être à l'image de l'entreprise. Or, les structures vont se modifier sous la pression de nouveaux facteurs de compétitivité, l'évolution du cycle de vie des produits et l'émergence des stratégies à long terme, rendant les systèmes de comptabilité classique obsolètes.

Les critiques de ces modèles (méthode des sections homogènes et ses dérivées) se portent principalement sur leurs bases conceptuelles. Tout d'abord, à travers une construction des coûts qui repose sur un classement en éléments fixes ou variables ou directs et indirects. Mais aussi par l'utilisation de clés volumiques et le choix problématique des unités d'œuvre.

La première réponse de ces carences vient d'outre-atlantique. Basée sur la notion d'activité (vision par centres de responsabilité), l'Activity-Based-Costing (ABC) ou Comptabilité par Activités a pour objectif de bouleverser les organisations de l'entreprise. La méthode se veut stable dans le temps et beaucoup plus précise que les systèmes classiques. Elle refuse les imputations en, cascade pour une meilleure vision des coûts et des causes qui les déclenchent. De plus, elle utilise de nombreuses unités d'œuvre (inducteurs de coûts) pour une plus grande rigueur.

Cependant, même si les activités se gèrent plus naturellement et plus facilement, la méthode ABC ne rompt pas nettement avec les méthodes conventionnelles, se retrouvant face à des difficultés classiques d'analyse des coûts. Les clés de répartition restent des estimations et les données élémentaires demeurent incertaines. De plus, cette méthode est pénible à mettre en place. La méthode ABC n'a pas su profiter d'une analyse fine par les processus.

En 1995 apparaît la méthode des Unités de Valeur Ajoutée (UVA). Prenant ses origines dans la méthode GP (avec la création d'une unité d'œuvre commune) et l'ABC (à travers la gestion par activités), la méthode a pour objectif de définir le profit de chaque facture. L'obtention du résultat par acte de vente ne peut se faire que par une étude précise de l'activité de valeur ajoutée: la méthode préconise l'analyse fine de tous les processus concourant à une vente. Les coûts seront ensuite répartis sur les produits et clients selon divers critères de classification traduisant leur niveau de consommation de ressources.

La phase de construction commence par le calcule des charges imputables à chaque poste UVA (le taux des postes). Les entretiens vont ensuite permettre d'établir les processus de valeur ajoutée dont les coûts découleront des taux des postes. L'analyse des produits et des clients déterminera le classement de ces derniers selon leur consommations de ressources et de processus. On calculera le résultat par vente en additionnant le coût des produits à celui du client exprimé en UVA. Les données seront retranscrites sous l'aspect très pédagogique d'une courbe de rentabilité (classification des ventes par ordre de profitabilité croissante) permettant de classer les ventes en différentes catégories.

Transformant ainsi une entreprise multiprocesseurs en une entreprise monoproductrice d'UVA, la méthode va permettre une analyse fine des résultats de l'entreprise. Elle a ainsi pour objectif la stratégie d'amélioration du profit basée sur l'analyse fine des processus de valeur ajoutée. mais l'UVA est-elle véritablement un outil de gestion révolutionnaire?

La vision apportée par cette méthode sur la gestion est totalement novatrice. Elle ne travaille pas en centres de profits mais en processus décomposés en opérations. Certaines charges de la comptabilité vont ainsi être remises en cause, le compte comptable n'étant pas une source d'informations suffisamment pertinente pour la méthode.

La construction de la méthode UVA reste longue et coûteuse en moyens humains, certaines variables sont donc indispensables à une mise en place réussie, notamment une présentation claire et précise des objectifs et des moyens à mettre en place. Si la méthode UVA est mal interprétée et passe pour un moyen de contrôle du rendement, l'information recueillie sera biaisée. L'acceptation de l'UVA mais aussi l'investissement du personnel est dès lors incontournable.

L'exploitation de la méthode est très variable selon les objectifs de l'entreprise, chacun construira l'UVA à l'image de ses besoins. Cependant la méthode s'adapte à tous types d'activités et il ne semble pas exister de taille critique pour la mise en place. Elle permettra d'améliorer sensiblement le système d'information aussi bien au niveau des coûts que du fonctionnement général de l'entreprise. Néanmoins la méthode ne bénéficie pas encore d'une très grande renommée, ce qui nuit à son développement. De plus, l'investissement humain et financier initial représentera un frein à la mise en place de la méthode.

Cependant, la méthode répond dans sa quasi-totalité aux limites des méthodes classiques et l'ABC. Et ceci grâce aux apports de ses différents concepts: une évaluation sur douze mois permet d'inhiber tous les phénomènes anormaux (saisonnalité ...), une unité d'œuvre unique simplifie les calculs mais aussi élimine les effets dfe phénomènes extérieurs à l'entreprise (taux de change, inflation ...). Et surtout, la méthode propose de véritables solutions aux problèmes de calcul des coûts grâce à son système d'information développé. En effet, même si les données sont encore imparfaites, l'UVA présente une qualité d'information bien supérieure à celle des autres méthodes. Elle permettra d'une part d'améliorer sensiblement le système d'information de l'entreprise facilitant le calcul des coûts, l'établissement de devis et de tarification et par ce biais la prise de décision stratégiques. Néanmoins, son utilisation en tant qu'indicateur permanent et en tableaux de bord n'est pas encore suffisamment démocratisée et fait l'objet des axes de développement de l'année 2000.